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Devoluy, Rabou-Chaudun par le sentier des Bans
Dans le Devoluy, au départ du petit mais superbe village de Rabou, un sentier serpente en corniche au bord de falaises abruptes, plonge dans les gorges du petit Buëch, traverse des hameaux oubliés des hommes et après une bonne dizaine de kilomètres, arrive au village abandonné, vendu par ses habitants à la fin du XIXème siècle, Chaudun.
Le sentier des Bans, c'est aussi et surtout le sentier que le facteur parcourait pour amener le courrier et les journaux au maire et au curé de Chaudun.
Un sentier qui me tient à cœur, j'en parle dans mon roman "La Clue", dont le titre est tiré de ce petit étranglement où les bouscatiers de Chaudun y construisaient un barrage temporaire, le temps de faire monter le niveau de l'eau et y bloquer les troncs de bois abattus avant d'ouvrir le barrage et de laisser filer les grumes pour une livraison plus en aval.
Chaudun coincé entre ses hautes pyramides de pierre, la Clue, les bouscatiers, le facteur, autant d'acteurs présents dans mon roman et ayant réellement existé....en parcourant ce sentier une énième fois, je me mêle à mes héros, ceux que j'ai placé là, dans mon imagination, Mauricette, Elzéard, Marie, Batiste, Louis et bien d'autres, aujourd'hui, je suis venu les accompagner. Je n'y étais pas revenu depuis la publication de La Clue.
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La voiture est garée sur le parking "randonneurs" de Rabou, rapidement le sentier s'élève, puis longe les gorges du petit Buëch par le haut, de tous côtés, la vue est superbe.
Au détour d'un lacet, un oiseau curieux nous regarde passer sans crainte, il ne s'approche pas, mais ne s'enfuit pas non plus. Un merle des roches, magnifique dans sa livrée orange et bleue, oiseau des Alpes qui se trouve généralement plutôt vers 2000m, ici nous sommes entre 1200 et 1300m.
Un coup d’œil (et de zoom) en arrière pour un regard vers l'église et la Mairie de Rabou, sur la croupe herbeuse
Le sentier des Bans se faufile le long de la falaise, parfois, les hommes ont creusé la roche pour le faire passer, jusqu'à la fin du XIXème siècle, ce sentier était le seul accès pour rejoindre Chaudun...ou en partir.
au point haut, plus de 1300m d'altitude, la vue sur la montagne de Barges se découvre
le sentier creusé dans la roche est vertigineux, le petit Buëch est à environ 100m plus bas, à pic !
puis dans un virage serré, il entame la descente pour rejoindre les gorges du torrent
Sur ce versant, en cette saison, les fleurs abondent
Campanule et son locataire
moi le provençal, je fais quelques infidélités à moun païs et je cueille un beau bouquet de sarriette très odorante...du pèbre d'ail des Alpes !
Phalangères à fleur de lys
Nous voilà sur la partie du sentier la plus délicate, pente transversale, pierres qui roulent, sol friable, ici, pas de négligences, on regarde bien où et comment on pose les pieds.
Cette portion de sente, éboulée chaque hiver, devait être refaite, chaque printemps revenu, par les hommes des villages pour que le facteur puisse reprendre ses tournées.
Passage avec vue directe sur le point d'atterrissage en cas de loupé, les gorges du petit Buëch en bas !
La sente reprend ensuite un cours plus "civilisé", en face de nous, là-haut, les aiguilles rocheuses, dites "cheminées de Luvie" nous annoncent que bientôt nous allons traverser une zone qui fut jadis habitée, le village de Luvie dont il ne reste que les ruines non arasées, la hêtraie superbe et mystérieuse et ses prairies et vergers désormais abandonnés aux vaches.
un petit gué à traverser, encore quelques fleurs sauvages
lavande odorante
et nous entrons à Luvie, les hêtres rendent les lieux sombres et leurs formes torturées donnent un air mystérieux à cet endroit, qui pourtant, il y 150 ans devait encore grouiller de vie paysanne.
Un hêtre qui "fait les gros yeux ! "
prairie et pommiers redevenus sauvages de Luvie, un endroit paisible qui contraste fortement avec la hêtraie
Nous entrons enfin dans le bois du Chapitre, forêt préservée laissée volontairement en l'état avec le moins possible d'intervention humaine
les troncs morts pourrissent et redonnent la vie...un monde infiniment petit habite ces bois pourris, insectes, champignons, bactéries...
Ancolie
Nous sommes légèrement en hauteur sur le torrent, tout juste une dizaine de mètres, sur le bord du sentier la flore est variée et magnifique, lys martagons en boutons prometteurs, fraisiers sauvages, barbes de bouc, etc.
Le sentier longe une paroi rocheuse, nous ne sommes plus très loin du goulet d'étranglement de la clue.
on voit bien, sur la paroi opposée, la maçonnerie qui servait à assurer le barrage de bois temporaire
les bouscatiers sur le barrage, à la Clue.
Le sentier traverse plusieurs fois le petit Buëch, toutes les passerelles ont, un jour ou l'autre, été emportées, il y a peu d'eau, nous remontons par le lit du torrent.
la dernière passerelle mise en place, démolie par le courant, par la chute d'un rocher (vu précédemment) ou ayant subit le poids du passage des vaches ?
la source en rive droite du torrent, aval de Chaudun, est en train de mourir étouffée par la mousse et la vase, et pourtant elle coule, mais pas par le canon de la fontaine, ce dernier vestige tangible de Chaudun mériterait d'être nettoyé et mis en valeur, dommage, un jour l'eau va se lasser et la source va tarir.
au droit de la source, enfouie dans une végétation de plus en plus dense, les vestiges du moulin aval (il y en avait un autre au cœur du village) , en fouinant un peu on y trouve la meule dormante et le local du moteur hydraulique, probablement à roudet horizontal comme aux moulins du Veroncle, Luberon.
Plus loin, un beau lys orangé nous annonce que Chaudun est maintenant tout proche
passage de la passerelle branlante d'un petit affluent
première gentiane jaune
et Chaudun est là, coincé entre de hautes pyramides de pierre, hélas plus rien de ce village, sinon la maison forestière de l'ONF, nous y avions dormi lors de Retrouvance en 2012.
Chaudun en 1880
la meule tournante du moulin du village, une table, la source qui laisse filer un peu d'eau, le pique nique se fera ici à l'ombre du grand frêne.
Raiponce en épi...ou chevelu !
Centaurée des prés
la superbe croix (rescapée) du cimetière sous la protection du Roc de l'Aigle
le portique de la chapelle comme un hommage. Ce portique est en photo en 1ère de couverture de mon roman.
Nous revenons par le même chemin, il est encore différent et tout aussi beau en sens contraire...pourquoi s'en priver ?
Buphthalmum Salicifolium...ou Œil de bœuf, dont les infusions servaient à combattre les morsures de vipères...
Une superbe rando comprenant quelques passages vertigineux, de 19km500 pour un cumul de dénivelé de 550m environ
L’éditeur, l’auteur ou le diffuseur ne sauraient être tenus pour responsables dans
l’hypothèse d’un accident sur cet itinéraire, et ce, quelles qu’en soient les causes.
Pour les secours composer le 112
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Commentaires
2Taleb claudrJeudi 2 Avril 2020 à 18:33Je l'ai parcourue pendant des années en courant! un régal ! Les 40 années l' ont gardé présent comme au 1er jour/
Claude
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Une belle balade avec de très belles photos
bises amicales
lyly