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Château-neuf-lès-Moustiers, Notre Dame sous roche
Pour la première de nos randos de ce séjour dans les environs des gorges du Verdon, ce sera une virée sur d'anciennes voies romaines qui va nous emmener, successivement, dans un village fantôme, laissé en l'état de ruines, puis dans une grotte étrange où se trouve une chapelle sous roche.
Nous voilà partis vers La Palud sur Verdon, puis direction, Château-neuf-lès-Moustiers par une petite route d'arrière pays.
L'accès au village de Château-neuf ne se fait qu'à pied, les voitures doivent être garées sur un parking en terre, à moins d'un kilomètre.
Sur la butte, les ruines du villages se dressent et défient le temps, le sentier devient très vite la voie romaine qui y monte en lacets.
Bordée de vieux arbres, elle annonce bien "l'état d'esprit des lieux".
et voilà, au sortir d'un virage, la première ruine apparaît
Un peu d'histoire...
Dès la préhistoire, le site est habité. Vers l’an mil, Les Moustiers, membres d’une puissante famille féodale, construisent le premier Château neuf.
Au milieu du XIIème siècle, un château-Donjon est édifié, une église et un village voient le jour.
A la fin du XIIIème siècle, la population s’élevait à 394 personnes et n’a jamais cessé d’augmenter jusqu’en 1836 ou elle atteint environ 600 habitants.
En 1936, il ne reste que 111 habitants dans l’ensemble des hameaux qui composent la commune. Difficulté de communication, disette, manque d'eau et la guerre ont vidé le village de ses habitants. (la guerre de 14/18 a tué 19 jeunes de la commune).
Par arrêté préfectoral du 1er février 1974, la commune de Châteauneuf-lès-Moustiers est rattachée le 1er mars 1974 à la commune de La Palud-sur-Verdon sous la forme de fusion-association pour former la commune de La palud-sur-verdon.
Le village est actuellement laissé à l'abandon en l'état, selon la volonté des habitants des hameaux alentours qui y voient, avec raison, un lieu de souvenirs.
Nous quittons la voie romaine qui contourne le village, pour l'aborder par le bas
les ruines sont sans toiture, mais les murs sont encore très hauts, portes et fenêtres ont perdu leurs encadrements, récupérés pour être utilisés par ailleurs probablement.
Village oublié, village abandonné, il y en a tant, mais ici, comme à Chaudun, les habitants y ont laissé l'empreinte de leurs âmes.
Belles et fières demeures de pierres
une très belle cave voûtée attirante...
des arches de pierres suspendues dans le ciel
ce qui fut probablement la rue principale, la calade y est encore bien nette.
La calade, ce pavement rustique fait avec des pierres, sans mortier de ciment, très fréquent en Provence.
Sur la butte, en bout du village, le Château Neuf datant du XIV ème siècle
puis, à l'autre bout, sur le sommet de la colinette, les ruines du Château Vieux du XII ème siècle, dont il ne reste plus qu'un simple tas de cailloux, mais là, à côté, l'église et son étrange histoire
Avec les mots de l'époque, le récit du drame de Château Neuf :
Le 11 juillet 1819, jour de dimanche, M. Salomé, curé de Moustiers et commissaire épiscopal se rendit à Châteauneuf pour y installer un nouveau recteur. Vers les deux heures et demie, ou se rendit en procession de la maison curiale à l'église. Le temps était beau, on remarquait seulement quelques gros nuages. La messe fut commencée par le nouveau recteur. Un jeune homme de dix-huit ans qui avait accompagné le curé de Moustiers, chantait l'épître, lorsqu'on étendit trois détonations de tonnerre qui se succédèrent avec la rapidité de l'éclair.
Le missel lui fut enlevé des mains et mis en pièces ; il se sentit lui-même serré étroitement au corps par la flamme qui le prit tout de suite au cou. Ce jeune homme, qui avait d'abord jeté de grands cris, ferma la bouche, fut renversé, roulé sur les personnes rassemblées dans l'église, qui toutes avaient été terrassées, et jeté ainsi hors de la porte.
Le curé fut trouvé asphyxié et sans connaissance. On le releva, on éteignit la flamme de son surplis, et l'on parvint à le rappeler à la vie environ deux heures après. Il vomit beaucoup de sang. Il assure n'avoir pas entendu le tonnerre, et n'avoir rien su de ce qui se passait. Le fluide électrique avait touché fortement la partie supérieure du galon d'or de son étole, coulé jusqu'au bas, enlevé un de ses souliers qu'il porta à l'extrémité de l'église et brisé la boucle de métal.
Ses blessures n'ont été cicatrisées que deux mois après. Il avait une eschare de plusieurs travers de doigt à l'épaule droite ; une autre s'étendait du milieu postérieur du bras du même côté jusqu'à la partie moyenne et extérieure de l'avant-bras; une troisième eschare profonde partait de la partie moyenne et postérieure du bras gauche, et allait jusqu'à la partie moyenne de l'avant-bras du même côté, une quatrième plus superficielle et moins étendue au côté externe de la partie inférieure de la cuisse gauche ; et une cinquième sur la lèvre supérieure jusqu'au nez. Il a été fatigué d'une insomnie absolue pendant près de deux mois ; il a eu les bras paralysés, et il souffre des différentes variations de l'atmosphère.
Un jeune enfant fut enlevé au bras de sa mère et porté à six pas plus loin ; on ne le rappela à la vie qu'en lui faisant respirer le grand air. Tout le monde avait les jambes paralysées. Les femmes, échevelées, offraient un spectacle horrible. L'église fut remplie d'une fumée noire et épaisse ; on ne pouvait distinguer les objets qu'à la faveur des flammes des parties de vêtements allumées par la foudre. Huit personnes restèrent sur place ; une fille de dix-neuf ans fut transportée chez elle sans connaissance ; elle expira le lendemain, en proie à des douleurs horribles, à en juger par ses hurlements de sorte que le nombre des personnes mortes est de 9 ; celui des blessés est de 82. Le prêtre célébrant ne fut point atteint. Tous les chiens qui étaient dans l'église furent trouvés morts dans l'attitude qu'ils avaient.
Une femme qui était dans une cabane, sur la montagne de Barbin, au couchant de Châteauneuf, vit tomber successivement trois masses de feu qui semblaient devoir réduire ce village en cendres. Il paraît que la foudre frappa d'abord la croix du clocher qu'on trouva plantée dans la fente d'un rocher, à une distance de 16 mètres ; elle pénétra ensuite dans l'église par une brèche qu'elle fit à la voûte, à la distance d'un demi-mètre de celle par où passe la corde d'une cloche ; la chaire fut écrasée. On trouva dans l'église une excavation d'un demi-mètre de diamètre, prolongée sous les fondements du mur jusque sur le pavé de la rue, et une autre qui rentrait sous les fondements d'une écurie, où l'ou trouva morts cinq moutons et une jument. On sonnait les cloches quand la foudre tomba sur l'église. "
les vestiges la voûte, plein cintre, de l'abside "en cul de four" en pur style Roman sont désormais maintenus par un échafaudage
à ses pieds, le cimetière qui, comme il se doit possède une porte en fer qui grince quand on l'ouvre, les tombes éparses, ne sont pas toutes bien entretenues
Avec un peu de nostalgie, comme il m'arrive souvent en ces lieux qui furent chargés de vie, nous quittons le village par la voie romaine qui file sur le versant est de la vallée du Bau
Notre deuxième visite est ici, cachée derrière un bouquet de yeuses et un peu en hauteur.
La grotte abritant la chapelle Notre Dame sous roche.
Pour y accéder, ouvrir un portillon en fer, gravir quelques marches étroites
et la voilà, une chapelle simple, sans aucun décor, datant de quand? nul ne saurait le préciser.
Plusieurs fois vandalisée, l'autel n'est plus qu'un simple tas de cailloux et la croix, faite de branchages liés ensemble
La grotte fut habitée, c'est ce que dit la légende, et personnellement j'aime bien croire aux légendes, par un Templier évadé de sa prison quand l'abominable Philippe le Bel fit la chasse au trésor du Temple pour renflouer ses caisses.Au bout de la corniche, une muraille percée de meurtrières permet de garder le site en ayant vue sur la voie romaine et la vallée
la grotte est à deux étages, la partie supérieure est accessible par un très étroit boyau qui se situe au fond de la petite cavité à gauche de la chapelle, reptation agile et cheminement en rampant sont de rigueur pour y accéder
Ce site est vraiment extraordinaire. Nous en repartons pour continuer notre parcours, qui sera nettement plus monotone. la voie romaine file au pied de la falaise qui borde le Mont Denier, parfois empierrée, parfois en charmant sous bois de hêtres superbes
Le torrent de Bau est traversé sur un pont de bois bien fragile, le pont Sant Peire
puis, la voie romaine monte en lacets jusqu'au hameau des Bondils
Où nous allons chercher la petite source fort jolie par ailleurs
Minuscule elle coule une eau fraîche qui se déverse un peu plus bas, dans le ravin.
Le hameau est traversé, nous filons sur la route goudronnée, pour, quelques centaines de mètres plus loin, prendre une piste, elle aussi ancienne voie romaine
qui repart en sens contraire sur le versant opposé, bientôt, la grotte de la chapelle et le village abandonné seront visibles...de loin.
des très beaux passages en sous bois d'automne
un sentier qui ne rappelle plus la voie romaine, où il faut parfois, un peu chercher son chemin
pour arriver dans un grand cirque rocheux qui descend en direction du hameau des Maurels
et là...nous attendent quelques mauvais kilomètres de route goudronnée, fortement pentue, qui donne du fil à retordre aux chevilles, aux genoux et autres vieilleries articulaires.
Ceci n'est qu'un reportage, l’éditeur, l’auteur ou le diffuseur ne sauraient être tenus pour responsables dans
l’hypothèse d’un accident sur cet itinéraire, et ce, quelles qu’en soient les causes.
Pour les secours composer le 112
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Commentaires
Ah, j'aurais bien aimé vous suivre cette fois-ci (moins acrobatique que d'habitude votre sortie !) car j'adore errer au milieu de ruines, cela m'émeut beaucoup ... Merci pour ce beau billet et plein de bisous !
Coucou Monique
le lien vers ton article sur la fête de la châtaigne, ne fonctionne pas. "une erreur est survenue" .
bises
jluc